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A l'Epicentre, Winston McAnuff et Fixi invitent au voyage

Publié le 24.10.2018

 

Winston McAnuff est un chanteur de reggae qui a fêté ses 20 ans en 1977. Formé au gospel et au reggae roots, il a mené une carrière internationale, tout en demeurant globalement inconnu du grand public. Il est redécouvert au milieu des années 2000 dans le milieu du rock et de la chanson française, notamment via l’album Paris Rockin’ auquel collabore le chanteur M à la guitare, et déjà autour du groupe Java et de Fixi. Batteur, pianiste et accordéoniste, ce dernier a notamment travaillé avec Tony Allen, maître tambour «historique» de Fela Anikulapo Kuti.

Winston McAnuff et Fixi présentent avec Big Brothers, leur troisième album en commun. Quelques jours avant de monter sur la scène de l’Epicentre à Collonge-Bellerive (3 novembre), l’accordéoniste évoque cette collaboration originale entre un rasta qui aime «sortir de la boîte», et un musicien adeptes des aventures musicales. Il est question d’une world-music ouverte aux influences, avec aujourd’hui vue sur le maloya de la Réunion, et du plaisir d’improviser sur scène.

 

Lorsqu’on découvre votre collaboration avec Winston McAnuff, on pense spontanément à un musicien invité qui vient se plaquer ponctuellement sur un projet jamaïcain. Mais cela va beaucoup plus loin que cela. Et depuis beaucoup plus longtemps.

Cela a commencé, il y a plus de dix ans, avec un rendez-vous en studio, avec entre autres des amis du groupe Java dont j’étais membre. J’ai proposé des thèmes au piano, Winston plaquait des textes dessus, avec une forme de fulgurance. L’accordéon était alors devenu prépondérant dans mon activité. Donc il fallait essayer, l’occasion était trop belle! Et ça a collé tout de suite. C’est un peu l’occasion qui a fait le larron!

 

Des artistes jamaïcains ont utilisé le melodica. Mais l’accordéon est peu présent dans le reggae. Et le genre, dans ses formes roots, apparaît comme assez fermé.

Au début, je craignais aussi les réticences de Winston. J’avais déjà tourné avec mon accordéon, j’en avais déjà beaucoup entendu à ce sujet. Mais il s’est enthousiasmé: «C’était l’instrument que jouait mon père à l’église!» Comme vous le dites, le reggae peut être assez fermé. Et pas seulement en Jamaïque. Mais c’est vrai pour beaucoup d’autres genres musicaux. Et en parallèle, il y a toujours des inventeurs, comme Lee Scratch Perry dans les années 60 et 70. Et des aventuriers. Winston McAnuff est complètement jamaïcain, et vit son monde rasta, mais en même temps il a envie de sortir de la boîte. Il est très ouvert, et a essayé la pop, le rock, la maloya.

 

Et cela avec ses musiciens ou avec les vôtres?

Le dernier album a été réalisé de manière assez nomade. Nous avons travaillé chez moi à Paris. Mais aussi en Jamaïque. Je collabore là-bas au projet acoustique Inna De Yard avec des musiciens locaux, j’en ai profité pour enregistrer avec eux des chœurs. Et d’autres projets m’ont beaucoup amené à La Réunion, où j’y ai enregistré des percussions.

 

La Jamaïque, La Réunion. Avez-vous des sources d’inspiration insulaires?

Peut-être, dans un sens c’est marrant, mais de l’autre ce n’est pas du tout prémédité. Comme je vous l’ai dit, j’ai beaucoup été à La Réunion pour des concerts et des résidences, l’année dernière. A la différence de la Jamaïque, l’accordéon y est très présent. Que cela soit dans le sega, influencé par la tradition française du bal, dans l’accordéon cérémonial qui fonctionne comme un appel à la transe. Et aussi l’influence très puissante de l’accordéon de Madagascar. Mais on retrouve comme en Jamaïque une culture créole et un très grand amour de la musique.

 

 

En plus de dix ans, comment a évolué votre association et votre projet musical?

Nous voyageons toujours dans de nouveaux endroits, que cela soit géographiquement ou musicalement. J’ai mentionné le maloya de la Réunion que j’ai fait découvrir à Winston. Cela nous a beaucoup inspiré, au point que Winston accepte de chanter en 6/8, ce que très peu de chanteurs de reggae roots acceptent de faire!

 

De votre côté, votre pratique de l’accordéon a-t-elle évolué?

Grace à lui, j’ai pu monter sur des scènes jamaïcaines avec des groupes locaux. Mon jeu n’est pas devenu plus rythmique. Aux percussions et au piano, j’avais déjà beaucoup joué de jazz, du funk et de l’afro-beat. Mais le reggae, sous son apparente simplicité, demande une grande précision. C’est comme un mouvement d’horloge. Cette expérience m’a sans doute apporté un ressenti par rapport à cette simplicité.

 

Vous mentionnez l’afro-beat nigérian. Vous avez travaillé avec Tony Allen, le batteur «historique» de Fela Anikulapo Kuti.

J’ai été pratiquement son bras droit pendant quelques années. Mais la collaboration avec Winston a pris plus d’importance. Pour autant, ce n’est pas fermé. J’ai invité Tony sur notre disque précédent. Et j’avais joué de l’accordéon sur l’un des siens.

 

Retour à Winston McAnuff et au concert de l’Epicentre. Vous arrive-t-il encore d’improviser sur scène?

Il y a beaucoup de ça. Il y a des moments d’improvisation et d’écoute. Il y a des moments où nous suivons le plan établi, organisé, des chansons. Mais nous avons aussi besoin des moments de liberté et d’explosions, ou chacun peut s’exprimer, où la musique et la spiritualité peuvent s’épanouir différemment. Winston McAnuff est aussi très sensible à cela – nous nous sommes bien trouvés.

 

Est-ce qu’il lui arrive de vous dire «non»?

Winston dit toujours oui!!!

 

Propos recueillis par Vincent Borcard

 

Winston McAnuff et Fixi seront en concert le 3 novembre 2018 à l’Epicentre à Collonge-Bellerive. Ouverture des portes à 19h45 (ouverture du café à 19h00).

Renseignements et réservations au +41.22.855.09.05 ou sur le site www.epicentre.ch

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