Social Tw. Fb.
Article

Saison 18/19 du Grand Théâtre de Genève sous le signe de l’urgence

Publié le 16.05.2018

 

Tobias Richter a présenté ce printemps la saison 2018/2019 du Grand Théâtre. Sa dernière saison à la tête de l’institution devait être placée sous le signe du retour à la Place de Neuve, dans un site historique rénové. Des impondérables ont changé la donne, retardé le déménagement de plusieurs mois, et prolongé d’autant la vie de l’Opéra des Nations, en activité depuis février 2016. Les deux scènes, très différentes, font qu’un opéra prévu sur l’une n’est pas praticable sur l’autre. La situation a donc amené les responsables à revoir leur saison dans l’urgence, et à accomplir une mission périlleuse.

Mais ce printemps, c’est davantage que le soulagement qui domine chez le directeur du Grand Théâtre. De grands classiques – Carmen de Bizet – et des spectacles rares – L’Opéra des gueux de Pepusch – seront proposés dès la rentrée sur la scène de l’Opéra des Nations. Avant des représentations du cycle intégral de L’Anneau des Nibelungen de Wagner pour le retour à la Place de Neuve, en février.

 

Avec l’opéra Carmen, de Bizet, la saison débute du 10 au 27 septembre sur une touche gaie, festive.

L’Opéra des Nations est une immense réussite, et ce dès son ouverture. Après l’annonce du changement de calendrier du déménagement, il était clair que nous devions apporter des réponses positives à notre public plutôt que de lui donner des excuses. Les circonstances de cette saison sont ce qu’elles sont. Ainsi, pour ce premier spectacle, Carmen, nous avons saisi l’opportunité de confier la mise en scène (et scénographie) à Reinhild Hoffmann. Elle avait monté l’année dernière le ballet Callas, qui a été un immense succès. Je savais que cette grande dame de la danse avait toujours rêvé de monter un spectacle autour du personnage de Carmen. Cette œuvre n’a pas été présentée depuis longtemps à Genève. Le contexte a facilité cette programmation.

 

Le Beggar’s Opera de Pepusch bien moins connu ensuite, pour une coproduction intégrant quatorze institutions.

Beaucoup l’ignorent, mais cette œuvre est à l’origine de L’Opéra de quat’sous de Brecht. Ici nous présentons celle de 1728, composée par Johann Christoph Pepush et écrite par John Gay. Cette version mise en scène par Robert Carsen et dirigée par William Christie est un projet relativement jeune, né il y a un an à peine. Il m’avait été présenté, mais je ne pouvais m’engager car il ne convenait pas à la scène de Neuve. Il convient en revanche très bien à celle, moins profonde, de l’Opéra des Nations. Voilà le contre-exemple du spectacle qui a bénéficié de nos ennuis! C’est un opéra associé au baroque, mais un baroque tardif, avec un sujet très terre-à-terre, proche des traditions populaires qui multiplient les allusions à la situation politique et sociale. Il y a peu d’œuvres de cette veine adaptées à une grande scène. Celle de l’Opéra des Nations, idéale, nous a permis d’en donner des aperçus à notre public: Alcina de Haendel, Il Giasone de Cavalli et ce printemps King Arthur de Purcell. Avec L’Opéra des Gueux, c’est aussi la fin d’un cycle.

 

Boris Godounov, du 28 octobre au 15 novembre, ramène aussi à votre faculté d’adaptation…

En effet, la version souvent jouée est celle arrangée par Rimski-Korsakov (1872), qui se prêtait bien au Grand Théâtre. Avec le retard du déménagement, nous allons présenter le Boris d’origine, celui composé par Moussorgski en 1869, qui s’adapte très bien à l’Opéra des Nations. Il y a quelques années, on a découvert des éléments qui ont permis de reconstituer la partition originale. On y découvre un drame, très dense, très concentré. En passant de l’un à l’autre, nous avons pris l’initiative, et sommes passés d’une situation regrettable à un projet magnifique, avec le charismatique Mikhail Petrenko dans le rôle-titre. Celui-ci nous fait d’ailleurs l’amitié de venir se produire en récital le 6 juin prochain.

 

 

Pour les retrouvailles avec la Place de Neuve, vous privilégiez un cycle intégral de L’Anneau des Nibelungen, dès le 12 février 2019, dans une reprise de la mise en scène de Dieter Dorn.

Pour la réouverture, une œuvre majeure du répertoire s’imposait. En programmant le cycle complet du Ring, de Dieter Dorn et Jurgen Rose, qui avait été créé ici-même, nous plaçons la barre assez haut. C’est la plus belle version de mon parcours professionnel, qui n’avait par ailleurs été présentée qu’une fois, il y a quatre ans. Le metteur en scène et le décorateur viendront personnellement. Il faut se mesurer à une très grande réussite, c’est un vrai défi.

 

 

La programmation peut aussi se placer sous le signe d’une fin de cycle avec la Médée de Charpentier, en mai.

Oui, après la Medea de Cherubini il y a quatre ans, puis Il Giasone de Cavalli la saison dernière, c’est au tour de la Médée de Charpentier. La mise en scène a été confiée à David McVicar, avec qui je travaille depuis longtemps. Il est depuis devenu un des grands metteurs en scène de notre époque, et je savais qu’il rêvait de monter cette œuvre.

 

Il n’est pas possible de développer le programme dans son intégralité. Pouvez-vous cependant évoquer la saison de danse?

Il est important de rappeler à quel point la danse est le deuxième pilier de notre institution. Notre compagnie peut assumer deux productions. Pour compléter l’offre, j’essaie chaque fois de mettre en place un spectacle complémentaire, et donc souvent un grand ballet narratif. Ce sera le troisième des grands ballets de Tchaïkovski, le seul que nous n’avions pas montré, La Belle au Bois Dormant, par le Yacobson Ballet, une compagnie très réputée basée à Saint-Pétersbourg (du 27 au 30 juin). Pour ma dernière saison, je voulais inviter à nouveau Sara Baras et sa compagnie, qui avaient rencontré un succès formidable à l’Opéra des Nations. Ils seront au Grand Théâtre avec leur dernière création, Sombras, du 28 février au 3 mars.

 

Propos recueillis par Vincent Borcard

 

Découvrez en détail la saison 2018/2019 du Grand Théâtre de Genève sur le site www.geneveopera.ch

Filtres