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tg STAN à la Comédie: la preuve par trois

Publié le 02.04.2019

 

Dès le 3 avril, la Comédie de Genève lance un festival voué à la Cie tg STAN. Trois spectacles sont au programme. Infidèles, sur des textes d'Ingmar Bergman (du 3 au 6 avril). Sa façon de mourir, de Tiago Rodrigues autour d'Anna Karenine de Tolstoï (du 9 au 12) et Atelier (du 14 au 17).

Natacha Koutchoumov, co-directrice de la Comédie, nous explique comment tg STAN fait souffler un vent de liberté sur le théâtre depuis une vingtaine d’années. En fan qui assume, elle raconte le choc produit par les premiers spectacles de la compagnie flamande, les différentes caractéristiques des trois spectacles proposés… et la chance offerte à ceux qui n’y connaissent rien de pouvoir découvrir coup sur coup et successivement le tg STAN comme les spectateurs ont appris à l’adorer, puis à l’occasion d’un hommage complice, et enfin «comme on ne les a jamais vu.»

 

Pourquoi un festival tg STAN en 2019?

C’est notre première saison à la tête de la Comédie, nous voulons montrer ce qui est pour nous emblématique dans le théâtre. Et pour nous, du point de vue du jeu, du rapport au public, il y a un avant et un après tg STAN. Ils se sont affirmés il y a plus de vingt ans avec une remise en cause du metteur en scène: il n’y a plus de metteur en scène, que des comédiens. Les tg STAN ont osé la simplicité à une époque où la qualité, c’était davantage des metteurs en scène formidables.

 

Un souvenir?

On rentre dans la salle, ils sont sur scène, disent bonjour, bienvenue. Cela anéantissait la surélévation de l’acte théâtral, le fameux quatrième mur explosait. Dans la deuxième partie des années 1990, c’était un choc total. Je me rappelle d’un Molière où ils lisaient le texte, et s’arrêtaient au milieu d’un passage émotionnel pour indiquer la direction des toilettes à un spectateur. La salle s’écroulait de rires. Ils mettaient à plat la zone trouble qui prévaut entre l’acteur et le personnage. Et cela n’empêchait pas que l’on soit touché, bouleversé. Donc oui, je suis fan de la liberté qu’ils ont donnée à notre génération. La grande force de tg STAN, c’est aussi que tout le monde peut s’y retrouver.

 

Tout le monde va se retrouver dans trois spectacles. Le premier Infidèles (du 3 au 6 avril), sur un texte d’Ingmar Bergman.

Infidèles, c’est le tg STAN classique – en collaboration avec une autre compagnie de la même trempe (de Roovers ). Il y a un rapport au texte et un rapport au public qui sont très forts. Les choses se tricotent et se racontent, l’air de rien. Il y a déjà, en amont, un texte lié à la vie de l’auteur. La force de la troupe est ici de nous donner l’impression d’assister à une pièce qui a un début, un milieu, une fin, avec une histoire de trahison. Mais ils décontextualisent totalement cela avec leur liberté par rapport au public, qui rend le texte incroyablement vivant.

 

Vous avez mentionné Molière. Les textes des spectacles proposés sont de Bergman et touchent à Tolstoï. Est-ce que les grands auteurs, les auteurs connus, sont des prétextes?

On ne peut pas dire ça. A une époque où il y a beaucoup de réagencement des textes, ils ont la particularité au contraire de les suivre très fidèlement. Nous l’avons encore bien vu dans leur traitement de Mademoiselle Julie en début de saison. Ils ont pris un extrait d’une vingtaine de minutes du texte quasiment intégral. Tout est dans le jeu.

 

Deuxième spectacle, Sa façon de mourir (du 9 au 12 avril), autour d’Anna Karénine de Tolstoï. Une collaboration avec une autre de vos références contemporaines, Tiago Rodrigues…

… Qui leur a écrit une œuvre superbe. Tiago Rodrigues raconte un personnage qui a un lien très fort avec un exemplaire d’Anna Karénine de Tolstoï. Cela part avec trois histoires enchâssées en trois langues (portugais, flamand et français), qui se rejoignent avec des fils narratifs qui se croisent qui se rencontrent. On comprend peu à peu qu’une des histoires ressemble à celle d’Anna Karénine. Puis qu’un des personnages est très proche d’un protagoniste du roman. Puis on se demande si une jeune femme dont il est question n’est justement pas Anna Karénine… En tant que spectatrice, je commence à me demander où finissent les comédiens et où commencent les personnages du roman. A quel moment passe-t-on de l’un à l’autre? Tiago Rodrigues trouve un moyen de nous retransmettre le vertige de l’œuvre.

 

 

Troisième spectacle, Atelier (du 14 au 17 avril).

Infidèles, ce sont les tg STAN tel qu’on les connaît. Atelier, c’est au contraire comme on ne les a jamais vu, à savoir qu’ils se taisent! Ils ont ce rapport au texte, cette capacité de montrer ce que peut produire le langage en direct sur un plateau. Et là ils se taisent, et le résultat est très… parlant. Le spectacle nous permet d’assister à la réalisation d’un décor de spectacle en direct. De la même manière que quand ils jouent un texte, ils nous montrent en paroles toutes les coutures, comme des modistes qui nous montreraient en permanence les patrons et les coutures de leurs créations. Avec la construction d’un décor, ils montrent le ciment, le chaos qui accompagne souvent ce processus, le désordre consenti pour créer un décor propre et en ordre. On retrouve visuellement ce qu’on apprécie d’habitude chez eux en paroles. Dans ce silence, tout est langage, ils ne font que nous parler sans nous parler. Cela met aussi en valeur une autre facette de leur identité, la drôlerie. J’ai toujours beaucoup ri à leurs spectacles, tant ils se démarquent des conventions théâtrales. Cela prend ici encore une autre dimension.

 

Propos recueillis par Vincent Borcard

 

Festival tg STAN à la Comédie de Genève du 3 au 17 avril 2019.

Infidèles, par tg STAN et de Roovers (du 3 au 6 avril)
Sa façon de mourir, par tg STAN, texte de Tiago Rodrigues(du 9 au 12 avril)
Atelier (du 14 au 17 avril) par tg STAN, de KOE / Maatschappij Discordia

Informations et réservations au +41.(0)22.320.50.01 ou sur le site du théâtre www.comedie.ch

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