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Contrechamps fête le premier siècle de Pierre Boulez

Publié le 06.03.2025

Contrechamps propose un programme Pierre Boulez, le 13 mars à l'Auditorium Ansermet, Genève. Pierre Boulez aurait eu 100 ans en 2025. Entré au Conservatoire en 1944, il s’initie à l’harmonie avec Messiaen, au contrepoint et y découvre la musique dodécaphonique.

Compositeur incontournable de l’avant-garde musicale et de l’école de Darmstadt, il contribue grandement au développement de la musique électronique en créant l’IRCAM, et la musique plus généralement en fondant l’Ensemble Intercontemporain.

Pour ce centenaire, les partenaires de longue date Contrechamps et le Collegium Novum Zurich se retrouvent sous la direction de Michael Wendeberg, qui fut lui-même pianiste de l’Intercontemporain sous la direction de Boulez.

Serge Vuille, à la tête de l’Ensemble Contrechamps, nous en dit plus sur les événements du mois de mars.

Entretien



Pierre Boulez avait l’habitude de réviser ses œuvres régulièrement, même après leurs créations. Sur Incises, par exemple, est un commentaire de Incises, composée quelques années auparavant. Qu’est-ce qui relie ces deux œuvres?

Sur incises est une pièce dans laquelle nous pouvons distinguer deux parties. Dans la première, Boulez développe assez littéralement le matériau de Incises.

En plus du développement, nous pouvons aussi parler d’augmentation, notamment dans les effectifs, car on part d’un piano seul à 3 pianos augmentés dans leur timbre par des percussions à clavier et des harpes. Le compositeur a travaillé sur les interactions des différents instruments et le spectre des timbres qui leur sont propres.

Le matériau musical présente différents motifs que l’on retrouve directement : une gamme descendante, une note martelée de façon répétitive, un autre motif final de la pièce...

Ces éléments sont étendus dans le temps, dans le spectre harmonique ou dans la durée et sont travaillés par Boulez pour créer une œuvre presque dix fois plus longue que le matériau original. 


Dans la deuxième partie de la pièce, il continue ce développement en mélangeant ces différents motifs et en laissant chaque matériel se décaler, se combiner de différentes manières avec les autres.


C’est une pièce assez spéciale, l’une des dernières du compositeur; il est rentré dans quelque chose de plus rythmique, plus cadré. Il est sorti de sa période de sérialisme intégral.



L’œuvre Sur Incises nécessite des effectifs très particuliers: 3 pianos, 3 harpes et 3 percussions-claviers. Est-ce une nécessité, dans ce cas, de collaborer avec d’autres institutions?


C’est beaucoup de mobilier et, effectivement, c’est essentiel de collaborer car nous nous retrouvons souvent face à cette problématique : tout le monde a les mêmes instruments et quand nous jouons des pièces à effectifs multiples comme celle-ci, collaborer est la meilleure manière de mettre nos instruments en commun.

Par ailleurs, comme ce sont des grosses pièces à monter, cela nous garantit aussi de pouvoir présenter le programme dans différentes villes, et plus précisément à Zürich et à Genève, mais aussi à Berne, dans le cadre d’une collaboration avec la Haute école des arts de Berne.

Outre la nécessité, c’est aussi l’occasion car nous adorons travailler avec d’autres ensembles et nous le faisons régulièrement.





Quelle est la place de la Haute école des Arts dans cette collaboration?

Contrechamps répète toute la série à Berne, et nous proposons aux étudiants d’assister à une générale. Quelques-uns d’entre eux rejoignent l’Ensemble, notamment pour la pièce Éclats/Multiples qui nécessite dix altos.

Michael Wendeberg, à la direction musicale, a travaillé avec Pierre Boulez à l’Ensemble Intercontemporain. Est-ce ce qui a déterminé le choix?

Plusieurs raisons rendent le choix évident. Michael Wendeberg a longtemps été directeur musical de Contrechamps. Il a également souvent dirigé le Collegium Novum ; c’est quelqu’un qui est proche de nos deux structures, donc c’est un avantage de l’avoir avec nous pour cette « réunion ».

Par ailleurs, le fait qu’il ait connu Boulez est un atout indéniable.

En 2019, nous avions déjà donné un concert intitulé « Boulez dirigé par son pianiste », au programme duquel figurait Sur Incises. Michael avait joué cette pièce et bien d’autres sous la direction de Pierre Boulez lorsqu’il était pianiste à l’Intercontemporain. Il y a un lien de filiation direct qui est très intéressant. Ce n’est pas un hasard.

Cette fois, le concert est aussi un vernissage du disque qui sort.

En 2020, nous avions programmé ce concert, mais annulé en raison du Covid. Pour le public, nous avions alors diffusé la version enregistrée en concert l’année d’avant. Les musiciens, eux, se sont rendus en studio pour enregistrer le programme.

Les événements de mars sont effectivement un vernissage d’un disque qui sort avec une gravure de Sur Incises et Éclats/Multiples enregistrés par Contrechamps et le Collegium Novum Zurich sur le label Bastille Music.

Nous nous retrouvons à la fin de tout ce cycle pour une série de concerts, mais la pièce a déjà été travaillée et enregistrée.

La sortie du disque et les concerts ont-ils été prévus pour le centenaire de Boulez ?

Au moment de prévoir cette série de concerts, nous avions visé le centenaire de la naissance de Boulez. Pour le CD, ce n’était pas forcément le but initial, mais il vient d’être fini ; cela prend toujours beaucoup plus de temps que ce que l’on pense.

Puisque nous avions de toute façon l’intention de marquer le centenaire du compositeur, nous nous sommes dit que c’était l’occasion parfaite d’associer le vernissage du disque aux concerts.

Le concert à Genève a une partie « création lumière ». En quoi consiste-t-elle ?


Nous avons un éclairagiste - Matthieu Baumann - qui nous accompagne tout au long de la saison. Chaque saison, il propose une nouvelle approche. Cette année, ce sont des espèces de grands miroirs qui s’installent sur le plateau.

L’idée n’est pas de rajouter un angle, mais d’exposer un point de vue esthétique sur ce qui se passe sur scène. C’est simplement pour accompagner le côté musical avec le côté visuel qui ne vise pas à raconter autre chose que la musique.

Ce qui est assez chouette avec les miroirs, c’est qu’ils sont positionnés un peu différemment sur chacun des concerts. On voit l’arrière des musiciens, des angles de vue que l’on n’a pas l’habitude de voir. Des reflets qui bougent un peu... sans faire grand-chose, cela crée une atmosphère propice à l’écoute et qui renforce l’attention, plutôt que de rajouter une histoire par-dessus. C’est, pour moi, une démarche qui vise à renforcer la concentration.

Depuis quelques années, Contrechamps semble tisser des liens étroits entre le son et le côté visuelle, notamment dans votre identité graphique?


Ce qui me tient à cœur, c’est de considérer le moment du concert, mais aussi tout ce qui constitue la vie de l’association, comme faisant partie d’un tout.

C’est important d’adresser le contexte plus général, et donc le contexte visuel d’un concert, aussi pour le rendre peut-être plus accessible en apportant plus de soin à sa présentation et à la manière dont on diffuse l’information. Il y a une cohérence entre tous les paramètres de nos activités.

Propos recueillis par Sébastien Cayet


Pierre Boulez
Le 13 mars 2025, 18h30, à l'Auditorium Ansermet, Genève

Michael Wendeberg, direction musicale
Ensemble Contrechamps - Collegium Novum Zürich
Matthieu Baumann, création lumière

Programme:
Pierre Boulez
Sur Incises (1996-1998) pour trois pianos, trois harpes et trois percussions
Éclat/Multiples (1966-1970) pour ensemble instrumental


En relation avec le concert: à 18h30, vernissage du disque de Pierre Boulez sur le label Bastille Musique - apéritif offert


Informations, réservations: https://www.contrechamps.ch/fr/saison/pierre-boulez-geneve

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